Je comptais écrire un billet pour raconter ce pèlerinage que je n’ai pas encore fait à l’heure où j’écris.
Mais je me suis rendue compte que si je veux planter le décor, expliquer commment ce pélérinage a été décidé, je suis encore partie pour un billet à rallonge.
Ce sera donc un billet ” à suivre “, il me semble que je ne l’ai pas fait depuis longtemps. Il faut bien que j’embête un peu mes blogamis qui se moquent de mes séries !

Préambule aussi long qu’un billet :

J’ai déjà raconté dans une série de billets, la maison de campagne, et aussi l’ami d’enfance.
Combien le deuil a été long et difficile.
Ce rêve récurrent, pas vraiment un cauchemar : je retournais dans la maison, les propriétaires nous la prêtait, nous laissaient nous installer. C’était toujours ma maison. Dans mes rêves, mon père est toujours là, mes parents sont toujours ensemble. Un de ces rêves étranges où les époques se téléscopent : mes sœurs sont des petites filles, mes filles aussi. Et souvent mon papa Eugène me parle de la maison, de nos souvenirs.

Et puis ce jour de mai où sur un coup de tête, j’ai pris la route avec Artémis pour revoir la maison que j’avais refusé de voir jusque là.
Après ce jour j’étais guérie. Je n’avais plus mal. Bien entendu je n’ai rien oublié, c’est impossible. J’ai raconté aussi ce pélérinage avec Cédric et Camomille, quand nous avons fait le tour du champ. C’était un jour de confidences. Cédric nous a dit :
- J’y suis retourné. Je suis venu un jour en vélo, je ne voulais pas vous le dire.
Camomille : moi aussi avec mon mari en voiture, je ne vous l’ai pas dit.
J’ai ri : moi aussi, avec Artémis, un soir.

Il y a peu j’ai eu plusieurs occasions de retourner à Saint Édouard, la petite ville près de la Folie où nous avons encore de la famille. D’abord pour les 80 ans d’une tante en septembre, seule avec Martine. Puis à la Toussaint, mon oncle et ma tante avaient fait dire une messe pour l’anniversaire de la mort de mes cousins. J’y étais allée avec Martine, Cédric et Camomille.

À cette occasion j’avais longuement parlé avec Arlette, la dame de la ferme, maman de Brenda et Hérvé, de l’âge de mes parents qui aime évoquer des souvenirs.
J’étais encore dans cette période où un nuage sombre obscurcissait mon horizon et où les paroles de la chanson de Claudio Capéo me collaient à la peau :
J’ai parfois l’âme grise, ma joie de vivre, qu’on me la rende…
Arlette me disait : tu te souviens quand tu chantais à tue tête sur le trapèze sous le noyer ” le petit pantin “,
tu te souviens que tu écrivais des romans avec ta machine à écrire ?
L’image de la petite fille au vélo rouge, puis de cette jeune fille rêveuse et romantique à cette période, la Toussaint, me faisait presque mal.

Mais oublions ces nuages aujourd’hui dissipés.

La maison reste un souvenir magique. Laurent l’appelait la petite maison dans la prairie, il enviait mon bonheur : des parents qui s’aiment, quatre enfants heureux. Sa maison était bien plus grande et bien plus belle, mais il y a des choses qui ne s’achètent pas.

Jolinette ma nièce était petite à la mort d’Eugène. Ses souvenirs de la maison de campagne sont bien moins précis que ceux de mes filles. C’est elle qui m’a dit : ” j’aimerais revoir la maison, mais pas seulement passer devant, y entrer “.

Je lui ai dit qu’Arlette et sa famile connaissent bien le propriétaire François. Je l’ai vu plusieurs fois lors de la signature chez le notaire bien sûr, mais aussi avant quand il restait des choses à débarasser dans la maison.
- Je vais organiser ça.

Arlette propose de nous inviter un dimanche à la ferme. Je lui ai demandé de prévenir François que nous passerions voir la maison Jolinette et moi. Il sera ravi, il est seul il s’ennuie un peu.
- Ta maman viendra ? me dit Arlette au téléphone
- Elle ne voudra pas voir la maison
- Ça ne fait rien, tu la déposeras chez nous avant !

Plus tard Arlette m’a rapellée : ” je suis allée voir François. J’ai revu la maison pour la première fois depuis que vous êtes partis. Je ne voulais pas voir avant, ça m’a fait drôle “.
Combien de fois nous a t-on dit : ” ce n’est plus pareil, non sans la famille Nathanaël, ce n’est plus pareil “.

J’ai attendu ce jour comme un jour magique. En même temps j’ai un peu peur des émotions qui vont me submerger.
Parle moi de mon enfance, de mon vieux ruisseau, du temps où coulait ma chance, au fil de son eau
Chanson d’Adamo, je ne peux pas l’écouter sans avoir une larme au coin de l’oeil, mais qui connait Adamo aujourd’hui ?

J’ai toujours aimé prendre cette route que je connais si bien en rêvant, surtout si il y a du soleil. Comme avant.

C’est aujourd’hui que je prends la route, avec mon réflex en bandoullère.

Et je ressens cette chose étrange que j’ai déjà lu quelque part :
Ce sera toujours ma maison. Dans mon cœur c’est toujours ma maison, aucune signature sur un acte notarié n’y changera quoique ce soit.

à suivre