Au hasard des archives, je suis tombée sur ce billet qui date d’août 2013. Je devais écrire un billet sponsorisé et je n’avais pas d’inspiration, je l’avais écrit avec Athéna qui avait trouvé l’idée.
Finalement il ne convenait pas pour le site, j’ai du en écrire un autre. Personnage fictif mais tellement réel que ce Raymond !
Cette année ce voisin lointain que nous avons toujours connu a quitté ce monde pour un monde meilleur. C’était lui qui surveillait la Sauvageonne en notre absence, quand son état de santé lui permettait encore. Martine lui envoyait ses vœux au nouvel an et l’appelait de temps en temps. Mes filles la taquinait en lui disant de l’épouser, il était célibataire et avait beaucoup de terres !
Je ne voulais pas spécialement écrire un billet pour lui. Mais en relisant ce billet ” Raymond “, je me suis dit qu’une réédition constiturait un bel hommage. Le paysage c’est bien sûr Petite Colline, ainsi que la photo.
Réédition du 17 août 2013
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Raymond habitait un petit village paisible du Sud de la France.
Ici, dans ce patelin de 300 âmes, tout le monde se connait. La population est plutôt vieillissante, mais les personnes âgées restent autonomes. Chacun a encore sa maison qu’il entretient tant bien que mal, une voiture ou une mobylette et une petite retraite.
Comme tous les samedis matin, ils feraient une partie de belotte, un rami ou une pétanque, selon l’état des articulations de Georges.
Il s’approcha de la table et des bancs de pique-nique où ils se rejoignaient d’habitude, et, à sa grande stupéfaction, il vit qu’une femme, apprêtée comme si c’était Noël, était assise à la table avec ses amis. Non pas qu’il n’aimait pas les femmes, bien qu’il n’en ai jamais eu lui-même, mais les amis de la bande étaient soit célibataires endurcis, comme lui, soit veufs, et jamais l’un d’entre eux n’avait exprimé le désir de trouver une bonne femme. Il s’approcha et salua la table d’un geste de la main, on lui répondit d’un signe de tête. Personne ne disait mot. Il resta debout et observa la femme qui était assise à sa place. Elle avait à peu près leur âge, et apparement, elle accompagnait Roger. Visiblement, elle n’était pas du coin.
Peut-être fut-elle gênée, car elle embrassa Roger sur la joue et comme pour les fuir, lui dit qu’elle allait faire un tour, qu’ils se rejoindraient à la voiture d’ici dix minutes. Roger lui fit un signe et et se tourna vers ses quatre amis. Raymond s’assit à sa place, à côté de Roger, et les trois hommes reçurent un regard noir.
Les trois amis acquiescèrent à l’unisson, ils s’en étaient rendu compte tout seuls. Restant coits, ils n’ajoutèrent rien. Mais Raymond, curieux de nature, brisa le silence et lui posa tout de même une dernière question avant qu’il ne s’en aille :
- Mais tu l’a rencontrée où ?
- Sur ordinateur ? Demanda Georges.
Roger les regarda tous les trois, il ne savait pas si la question reflétait leur ignorance de ce qu’était un ordinateur, comme lui il y avait à peine un mois, ou s’il s’agissait d’un jugement négatif.
- Les machins avec des lettres et un écran ? Questionna Raymond,car il lui semblait en avoir déjà vu un.
- Oui, répondit Roger, c’est ma nièce Caroline qui m’a montré, tu sais, elle travaille à la médiathèque. Elle m’a dit qu’on pouvait tout trouver sur l’ordinateur les tracteurs, les vaches, les voitures, même une femme ! Alors elle m’a aidé à trouver, tu comprends, je me fais vieux et la maison est bien grande pour moi tout seul.
Georges et Eugène ne semblaient pas bien comprendre, mais Raymond le comprit. Il était célibataire, tout comme Roger, ils ne s’étaient jamais mariés et n’avaient jamais eu d’enfants. Georges lui, avait perdu sa femme cinq ans auparavant, et Eugène deux ans plus tôt. Le fait de retrouver une femme sur ordinateur comme on achèterait une vache les choque peut-être. Ils ne reprendraient jamais quelqu’un bien sûr, en tant que veuf, ça ne se faisait pas ici.
Retournant vers sa voiture, Raymond regarda la ruelle qui monte vers l’église, et vers la médiathèque. Après tout, se dit-il, lui aussi avait le droit de ne plus vivre tout seul ! Il entra dans la médiathèque, contourna quelques étagères pleines de livres, et tapota sur l’épaule de Caroline. Elle sursauta et se retourna.
- Oh Monsieur Raymond, qu’est ce que vous faîtes ici ?
- Euh, tu vois, ton oncle m’a dit que tu lui avait trouvé une femme sur ordinateur, et je me demandais si tu voulais bien me faire pareil, enfin tu vois…
Raymond trouva cela très intelligent, et se demanda pourquoi personne ne lui avait jamais parlé de cette idée qui lui ferait économiser des timbres. Ensuite Caroline lui ouvrit une page internet, et lui expliqua brièvement à quoi cela servait. Elle tapa l’adresse du site de rencontre, et la page s’ouvrit. Raymond regarda toutes ces images colorées bouger, s’agiter, ce texte défiler, il en aurait presque eu mal à la tête.
Raymond fit grise mine, il interrogea Caroline du regard. Elle lui expliqua que ce n’était pas un site de rencontre mais un site qui servait à proposer des services, l’annonce avait dû être supprimée.
Mais peut-être pouvait-il trouver quelqu’un d’autre sur le site de rencontre qu’elle lui avait proposé ?
Raymond sembla désemparé :
Il entretenait une conversation téléphonique avec Paulette un jour sur deux, ils s’entendaient bien. Raymond n’avait osé se montrer entreprenant, c’est Paulette qui un jour, lui a proposé de venir déjeuner chez elle, ce dimanche après la messe. Son costume sentait un peu la naphtaline et ses cheveux manquaient à l’appel, mais il avait retrouvé le sourire.
Descendant les marches de sa maison, il tapota la tête de son chien, le sourire aux lèvres, et partit presque en sautillant vers sa voiture. Il n’était plus seul, et espérait bientôt emmener Paulette sur la promenade, l’accompagner pour une partie de belote.