C’était le prin­temps, je fai­sais ma pro­me­nade du diman­che habi­tuelle. Tour d’un étang, pas­sage dans la forêt, tour d’un deuxième étang, je n’ai jamais chro­no­mé­tré, ça doit pren­dre un peu plus d’une heure. 

Le temps était beau, mais il avait plu, quand je quitte la route gou­dron­née pour pren­dre le sen­tier dans les bois, c’est gadouilleux, il faut évi­ter les fla­ques. 

Devant moi un papy pro­mène son chien, je mar­che plus vite que lui, je le rat­trape. Il me voit arri­ver, il me lance une phrase du style “il fait beau après la pluie qu’on a eu ven­dredi…”. 

Je réponds sur le même ton. Un groupe arrive dans l’autre sens, une famille, des VTT, nous devons nous met­tre sur le côté pour les lais­ser pas­ser. Puis je reprends mon pas, m’apprê­tant à lais­ser le papy der­rière moi. 

- Ne mar­chez pas trop vite, vous allez vous fati­guer ! 

Fati­guée moi ? Non mais il me donne quel âge ? Je vois le papy s’ennuie et veut dis­cu­ter ! Échan­ger deux phra­ses avec des per­son­nes que je croise en balade, ça m’arrive sou­vent, mais ce n’est pas pour autant que j’ai envie de faire toute la balade avec eux ! 

Mais bon je vais faire un effort, je me donne jusqu’au bout du sen­tier, dès que je rejoins la route gou­dron­née, je trace ! 

La papy me mon­tre un groupe de mai­son et me dit qu’il habite ce quar­tier. Il me demande où j’habite, je dis ma ville sans pré­ci­ser le quar­tier. Il me parle aussi de son chien, puis me dit qu’il est en retraite… oui ben ça j’avais un peu deviné !

Il me demande ce que je fais comme tra­vail, ça je vous l’ai déjà dit, je déteste qu’on me le demande ! Tout comme je n’ai aucune envie de m’éten­dre sur le temps de trans­port pour aller à Paris en pas­sant par telle gare de ma ban­lieue ! 

Puis tout à coup le papy me dit : 

- Com­ment tu t’appel­les ? 

Oh la la tous mes signaux d’alarme se met­tent au rouge ! Ce n’est pas un papy qui s’ennuie, c’est un papy qui dra­gue ! 

Le tutoie­ment d’abord, et ensuite me deman­der mon pré­nom ! Je n’ai aucune envie de don­ner mon pré­nom à un inconnu, d’ailleurs si ça se trouve c’est aussi mon nom qu’il veut, his­toire de me retrou­ver bien vite, via l’annuaire main­te­nant qu’il con­nait ma ville ! 

Non le pré­nom c’est trop intime, c’est trop secret pour que j’ai envie de le don­ner à un inconnu avec qui j’ai échangé trois phra­ses sur le beau temps ! 

Je réflé­chis à toute vitesse, et je suis sau­vée par mon blog, un blog ça sert à tout, je pro­nonce le pseudo deve­nue ma seconde peau, ma deuxième vie : 

- Loui­sianne ! 

Avec ça il ne ris­que pas de me retrou­ver (à part sur goo­gle) s’il a de la mémoire il ne ris­que pas de l’oublier, si il n’en a pas, il ne le retien­dra pas ! 

Il me dit son pré­nom à lui, celui de mon père. Ça m’agace, per­sonne n’a le droit de por­ter le pré­nom de mon père adoré, rela­ti­ve­ment rare. 

Ensuite il doit y avoir quel­que phra­ses, mais je me suis retran­chée dans ma tour d’ivoire, je dois être très froide, très lapi­daire dans mes répon­ses. 

Quand nous arri­vons à la route, je lui dis “aure­voir, bon diman­che” et je trace ! 

Mes filles vont bien rigo­ler ! Je croyais avoir passé l’âge de me faire dra­guer dans les bois !