J’ai grandi dans une famille nombreuse. Dans ces années où Françoise Dolto n’avait pas encore mis son grain de sel. D’ailleurs mon père se moquait de moi quand je lisais Dolto parce que j’étais maman.

J’ai toujours eu l’impression de faire partie d’un bloc compact ” les enfants “.

Les enfants tous pareils, tous la même personnalité.
Cela évite de chercher à les comprendre et à les connaître. Ainsi on les prive de leur personnalité, de leurs différences. Ils sont phagocytés, dans le rang on ne veut voir qu’une tête.

Les différences pourtant les parents savaient les voir. Quand il s’agit de vous comparer ! Pas pour vous complimenter bien au contraire mais pour mettre en avant la qualité que vous n’avez pas : ta sœur au moins elle travaille bien à l’école, ton frère au moins il est aimable !
Les parents n’imaginent pas combien les comparaisons font mal.

Il y a aussi une attitude presqu’invisible qui consiste à ne jamais intervenir dans les conflits entre enfants. Les coups, oui les parents réagissent : on ne frappe pas !
Mais le mépris, les paroles blessantes ils ferment les yeux. On leur apprend à bien se comporter avec les autres, mais pas avec la fratrie. Cela ne se voit pas.
Mais c’est ainsi qu’à l’âge adulte certains gardent une attitude méprisante, insultante dont ils n’ont même pas conscience avec leurs frères et sœurs.

Plus les familles étaient nombreuses plus la mère avait des excuses, comme me l’a dit Martine un jour : ” Tu penses bien que si on en a 6, on fait ce qu’on peut ! Les nourrir, les habiller, les tenir propre, c’est tout ce qu’on peut faire ! Il ne faudrait pas qu’ils se plaignent en plus, il y a plus malheureux qu’eux “

Bien que j’ai toujours essayé de ne pas mettre mes filles dans le même sac, je sais que l’on peut tomber facilement dans cette facilité, surtout si les enfants ont peu de différence d’âge.

Bien sûr il y a des évidences, des phrases que nous disons tous : les enfants aiment bien le cirque, les enfants aiment manger ceci ou cela, ils n’aiment pas telle ou telle chose.

Je me souviens de l’époque où un dimanche soir sur deux Benjamin me ramenait les filles après un week-end où j’avais profité du calme de la maison. J’entendais le portail claquer, puis quatre petits pieds qui couraient dans l’allée, toutes contentes de me retrouver.
Puis très vite j’avais l’impression d’être prise dans un tourbillon. ” Elles sont tellement pleines de vie qu’elles m’épuisent ! “.

Je savais pourtant que c’était Athéna qui ne tenait pas en place, entrainant Artémis dans son sillage. Artémis beaucoup plus calme, pouvait réclamer mon attention plus longtemps après cette courte séparation, mais ce n’était pas un tourbillon.

Je tombais donc dans la facilité quand j’employais le pluriel ! Il aurait fallu plutôt dire que c’est ce que je ressentais, moi : la fin d’une courte tranquillité, mais il ne s’agissait pas de la personnalité de mes filles.

Lorsqu’Athéna a quitté la maison, Artémis a pu prendre une place différente. J’en parle souvent. Plutôt taiseuse, elle s’est mise à me parler. Et même si elle a du caractère et que nous nous accrochions, nous avons apprécié d’être deux calmes.

C’est ce qui manquait à une époque où les enfants étaient un bloc compact : des têtes à têtes avec les parents.

Camomille qui en a 4, consciente du fait que Luc pris par le travail est moins souvent avec ses enfants a décidé que chaque enfant aurait une journée seul avec son père. Ce jour là les enfants ont le droit de choisir l’activité et le repas qu’ils souhaitent, parc Astérix avec MaqueDalle par exemple.

C’est pour cette raison que je n’ai pas voulu de famille nombreuse, même si jeune je voulais trois enfants. Je voulais rester disponible et à l’écoute de chaque enfant, et je n’étais pas sûre d’en être capable avec trop d’enfants.

Aujourd’hui je suis contente car même si mes filles sont en couple, j’ai encore des têtes à têtes avec elles, et aussi des moments à nous trois (mère et deux filles), en plus de notre chat permanent.

Pour conclure je vous rassure, je ne prétends pas avoir eu une enfance malheureuse !
Je n’ai pas aimé être un bloc compact, mais quand j’ai grandi mes parents ont mieux vu qui nous étions.

Chaque enfant est différent. Certains ont besoin de plus d’écoute et d’attention que d’autres. Et ceux qui préfèrent qu’on leur lâche la grappe, sauront très bien vous le faire comprendre !