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Certain décors, certain univers me rappellent mon enfance. Comme si il y avait en moi cette petite fille bien cachée, mais qui ne demande qu’à revivre.

C’est mon univers, mon jardin secret, je devrais dire mon jardin profond.

Si je pense amour, flirt, des images viennent naturellement à mon esprit. Sud, soleil, danse, cheveux bruns, odeur, campagne, liberté. Si je pense à ça je pense au présent.

Mais lorsque je rêve d’être aimée avec un A, je pense à mon univers. Je pense à cet univers que j’aimerais bien partager avec quelqu’un, à ces choses dont je ne parle presque jamais.

Je vois des quartiers de Villenatale, je vois des rues, une église, et j’entends le son des cloches. Je vois un appartement, du parquet ciré, des moulures au plafond blanc, une bibliothèque pleine de livres, un tapis rouge.

Je me rends compte alors que même si j’ai un coin de Sud dans le cœur, un besoin de campagne, je suis une citadine. Et plus encore qu’une citadine. Les appartements sous les toits, les mansardes, les cours pavées. Et comme disait mon beau frère en parlant de ma sœur et de moi “il vous faut un centre ville historique sinon rien”

Cet univers c’est un décor, c’est aussi le visage de mon père, mais c’est surtout mon jardin secret, mon jardin profond.

Un jour un homme m’avait dit que j’étais comme une poupée gigogne qui ne montrait aux gens qu’une facette, mais que sous la poupée, il y en avait une autre, puis une autre. Et tout à la fin une toute petite Louisianne. Il se demandait s’il serait assez fort pour atteindre la toute petite Louisianne, il était conscient de toutes ces portes à ouvrir. Cette succession de portes que tant d’hommes ne voient pas chez les femmes, ils croient qu’ils ont gagné quand ils ont mis une femme dans leur lit.

Et cet univers je l’ai peu partagé. Mais quand j’y pense, c’est ton visage que je vois. Le visage de l’amour. Les souvenirs de cet autre univers que j’ai partagé et qui ressemblait au mien.
Les souvenirs de grenier sous les toits, de parquet ciré et de plafond blanc.

C’est toi le seul à connaître ce jardin secret, le seul à qui il parle. Peut-être que je serais capable de dire que l’amour ne dure pas toujours et de le croire, tant de couples se défont, tant de choses évoluent.

Et pourtant je sais qu’on ne cesse jamais d’aimer complètement quelqu’un que l’on a aimé. L’amour a toujours le même visage. Il n’est peut être plus. Il est peut être éteint, tari, disparu, enterré dans le passé. Il n’existe plus, n’a plus de présent, n’a plus d’univers, ou deux univers trop différents.

Et nous nous sommes deux amis qui rient et qui parlent en société, deux complices, parfois même deux larrons en foire.

L’amour n’existe pas.

Il se cache, il porte un masque. Mais soudain il y a un décor. Un décor qui peut nous être étranger comme la maison d’un autre. Un détail, une planche qui s’échappe d’un parquet en chêne, un plafond fissuré : Y a t-il y a un grenier sous les toits ? Une odeur de cire peut être, ou une bibliothèque pleine de livres. Mais ça peut être une rue, une cour pavée, un immeuble avec des angelots sculptés au dessus des fenêtres.

Alors soudain plus de paroles. Nos regards se croisent. Émotion, apaisement. Comme si nous rentrions chez nous après un long voyage.

Toi tu sais. Toi tu es le seul à savoir. Et moi je suis la seule à savoir pour ton univers aussi.

L’amour aura toujours le même visage.