57532251

La vie d’Enguerran devient très compliquée ! Car bien qu’il travaille avec sa maîtresse, il lui est très difficile de trouver du temps pour la voir. Et depuis ce jour où Ludmilla a pris les devants en l’embrassant, évitant tous les discours, il ne peut plus s’empêcher de la toucher. Plus tard les paroles, plus tard les promesses, plus tard les remises en question !

Seuls les corps ont des choses à se dire, une année à rattraper ! Hélas il est difficile de trouver du temps : impossible par exemple de découcher.

Alors Enguerran et Ludmilla adaptent leur travail en fonction de leurs escapades. Enguerran se rend dans une ville voisine, Ludmilla prend sa voiture pour soi disant rentrer déjeuner chez elle et retrouve son amant à l’hôtel. Parfois ils arrivent même à fermer le cabinet l’après midi. Enguerran se débrouille pour le faire le mercredi : il sait que Carola ne passera pas devant le cabinet par hasard, car elle a ses enfants, et il connaît par cœur ses horaires.
Du coup il a remis au lendemain son projet d’embaucher : tant qu’ils ne sont que deux, Ludmilla et lui au cabinet, il font ce qu’ils veulent de leur planning !

Parfois il est fatigué, fatigué de ce stress permanent, fatigué d’avoir peur que Ludmilla se lasse, ou que sa femme ne le prenne la main dans le sac. Fatigué d’occulter toutes les questions qu’il devrait décemment se poser sur l’avenir. Fatigué d’être moins disponible pour ses enfants.

Mais il est tellement heureux qu’il oublie la fatigue ! Et il remercie intérieurement Ludmilla de ne rien lui demander, de ne pas lui mettre la pression, de sa patience.

Carola a perdu le sommeil. Elle sent confusément quelque chose qui ne colle pas, mais est incapable de mettre le doigt dessus. Le danger est là.

Elle continue à réagir comme elle l’a toujours fait : elle croit avoir mis Ludmilla dans sa poche, elle croît savoir comment elle fonctionne.

Elle l’invite souvent à dîner, et discute. Elle amène souvent le même sujet sur le tapis : M. X qui trompe sa femme, le vilain pas beau ! Mme Y qui a quitté son mari, elle a bien fait, il avait une double vie !

Elle espère entendre Ludmilla l’approuver, elle en est pour ses frais ! Ludmilla ne rentre pas dans son jeu. Alors elle tente de lui demander subtilement si elle a quelqu’un dans sa vie, si elle cherche… Une femme seule ce n’est pas normal, cette Ludmilla est louche !

Là encore elle est en pour ses frais, Ludmilla reste muette.
Mais la plupart du temps, Enguerran change de sujet, il sait qu’il vaut mieux éviter de s’aventurer sur ce terrain glissant ! 

Car il sait très bien où tout cela va mener : à une Nième crise de jalousie ! Depuis l’été les crises se multiplient.
Elles sont venues, insidieuses, dès qu’Enguerran disait bonjour à une femme, même de la famille. Carola s’était mise à voir le mal partout, à surveiller ses gestes, ses regards.

Elle aurait pu lui reprocher sa complicité avec son clerc de notaire, mais non ! Elle lui faisait des reproches pour toutes les femmes : celles qui passaient dans la rue, la boulangère parce qu’elle avait souri, la petite nièce qui lui faisait la bise !

Toutes ! Alors qu’il n’a rien à se reprocher (en dehors de Ludmilla bien sûr) le monde est devenu un repaire de femelles qui ne voient que lui, qui ne rêvent que de se jeter sur lui pour lui arracher ses vêtements !
Il pourrait en rire à l’idée d’être devenu un s*ex symbol qui s’ignore, mais c’est insupportable. Pire : Carola qui a d’habitude si peu de vocabulaire a un lexique très fourni sur le thème de l’infidélité, la trahison, la confiance. Il songe un brin ironique aux séries TV et autre courriers du cœur !

Curieusement Carola se calme quand Ludmilla vient en week-end à la fin de l’été. Mais il ne l’a noté que plus tard, car pour tout avouer il ne prêtait aucune attention à son épouse !

Mais plus tard, dès la rentrée, vu que Carola n’était plus 24 h sur 24 avec son mari, et qu’elle ne pouvait plus l’accuser de faire du gringue à la boulangère ou la pharmacienne, Ludmilla devient le principal sujet des scènes de jalousie.

Il ne répond pas aux multiples questions. Elle te plaît ? Elle te drague ? Et toi tu la dragues ? Tu as déjà essayé ? Tu vas où ? Avec elle ? Tu rentres quand ? 


Et il ne comprends pas pourquoi Carola s’obstine à inviter sa rivale à dîner. Il a vraiment du mal à supporter ces soirées. Il en parle souvent avec Ludmilla, qui ne sait pas comment faire pour refuser, car si elle refuse, une date ultérieure lui est proposée ! 

Ludmilla ne sait pas qu’Enguerran a droit à des scènes de jalousie. Elle voit bien que Carola est bizarre, qu’elle aborde toujours le même sujet.
Parfois elle se dit : elle se méfie et croit que si j’abonde dans son sens en fustigeant les infidèles, je ne lui piquerai pas son mari !
Parfois elle se dit : ce n’est pas possible, elle sait ! Oui mais si elle savait ne m’aurait-elle pas déjà arraché les yeux ?

Ludmilla est sûre d’une chose : Enguerran et elle sont partis pour une histoire sans fin !

FIN