Quand nous étions enfants, les grands-pères et les grands-mères* nous soûlaient un peu avec le mot santé à tout bout de champ :
- Bonne année et surtout la santé… La santé d’abord.. Tant qu’on a la santé ! 

Sans compter qu’ils aimaient bien nous parler de leur petits bobos avec des mots barbares : arthrite, varices, rhumatismes. 
Je me souviens que lors de mon premier voyage scolaire en Angleterre où nous étions logés dans des familles, la prof d’anglais nous avait fait lire un texte, l’histoire d’un jeune homme français à qui on présente la mamie de la famille. Il se dit que les vieux aiment parler de leur santé et se lance dans une liste à la Prévert sous l’œil affolé de la grand-mère. Notre prof nous explique donc : attention les anglais ne parlent pas de leur santé ! Par pudeur, donc même si votre mamie adore ça, prudence outre Manche ! 

J’avais une amie que je vois toujours de loin en loin et qui ” n’avait pas la santé “. Je crois qu’elle a eu tous les problèmes du monde, scoliose, os fragiles, maladie neurologique. Elle a été opérée de la hanche à 30 ans, ce qui arrive plutôt à un âge très avancé. Je ne comprenais pas grand chose à ses mots, ni à ses multiples hospitalisations, je la plaignais mais avouons-le ça me soûlait un peu. 

Bref comme dirait Martine, il arrive un moment où même les plus costauds d’entre nous ont des soucis de santé, ou leur parents ou conjoint. Du coup je ne suis pas trop niaise côté médical, même si on ne peut pas tout savoir. Benjamin le père de mes filles a travaillé de longues années à l’hôpital et me racontait des choses pas très gaies, maintenant il fréquente l’hôpital en tant que patient.
Je me souviens en 2015 lors de la première hospitalisation de Martine, mon frère m’a demandé ce qu’était le service ” gériatrie “, ça m’a paru bizarre car j’ai l’impression de connaître ce mot depuis toujours.

Martine a quitté l’hôpital rapidement, un peu trop à mon goût. Depuis elle est toujours alitée. Elle souffrait et se plaignait, ce qui est rare. Le médecin qui était le mien et est devenu le sien se déplace heureusement à domicile. Il a constaté qu’il y avait une erreur dans l’ordonnance de l’hôpital et un surdosage d’antibiotiques a provoqué une mycose de la bouche jusqu’au bas ventre. Il a donc diminué le traitement antibiotiques qui s’arrête lundi et prescrit un traitement. Ensuite elle aura des prises de sang et analyses d’urine à domicile. 
Pour le moment il y a toujours quelqu’un pour la faire manger car c’est les vacances scolaires, Cédric a trouvé une dame qui viendra deux fois par semaine pour la faire manger et pour la toilette et une grande toilette le samedi. 
Le médecin a fait une ordonnance pour aller à la mairie au CCAS voir ce que l’on propose pour Martine. On appelle cela une ordonnance, en fait c’est le médecin qui décide si la personne n’est plus autonome et a besoin d’aide à domicile. 

Nous espérons qu’elle reprendra des forces et ne restera pas au lit, cependant Servane que j’ai eue au téléphone récemment estime qu’elle est de moins en moins autonome. J’espère surtout qu’elle va se remettre à lire et regarder la télé parce que ne rien faire du tout ne doit pas être bon pour le moral. 

Au téléphone Martine me dit que sa seule motivation est de venir me voir, voir mon appartement et voir mes filles et mes gendres qui sont un peu trop loin d’elle. Pendant qu’elle était à l’hôpital, dans le même hôpital mon neveu Luigi était au chevet de sa femme Marion qui a mis au monde un petit Élias.
Martine ne semble pas se réjouir d’être arrière grand-mère pour la deuxième fois, peut-être qu’elle ne réalise pas vraiment. 

C’est tout de même incroyable ces erreurs d’ordonnance ! D’après Servane, on devait leur donner une ordonnance à la sortie de Martine. Mais on a rien donné à Cédric, une fois Martine sortie il a appelé l’hôpital qui lui a dit ” on reste sur la première ordonnance “. Servane m’a dit aussi que Martine n’avait pas pris les médicaments apportés lors de son arrivée aux urgences : ” ils ne se parlent pas entre eux les soignants “. 

Je suis consciente que le personnel est débordé, en sous effectif. Martine est entourée par sa famille heureusement, mais je penses aux personnes âgées qui n’ont pas cette chance et qui n’ont pas le réflexe comme nous adultes en pleine possession de nos moyens de se dire  : il y a un truc qui cloche !

* J’ai du vérifier l’orthographe du pluriel de grand-père et grand-mère. Cela me rapelle la primaire quand on écrit grand’mère et grand-père ou le contraire. Il fallait retenir “grand’mère chausse ses lunettes (dont apostrophe) grand-père chausse ses souliers, donc trait d’union. Jusqu’au jour où tout le monde a mis des souliers !