Je voulais parler de deux histoires en une... Mais mélanger les histoires d'amitié de bureau, avec une belle histoire à la campagne, bof... Donc j'ai gardé Nathanaëlle pour la fin...

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Lorsque Nathanaëlle est revenue, je n'ai pas parlé tout de suite de ma belle histoire. J'ai attendu quelques jours, un jour où on s'est retrouvée en tête à tête au restaurant. Elle était étonnée. Elle m'a demandée si j'avais des photos. Je n'avais pas de photo de lui et moi, mais des photos de lui à la maison de campagne...

J'ai compris plus tard pourquoi elle voulait voir des photos. Louisianne est une grande rêveuse, elle a tout inventé. Elle m'avait déjà dit des petites choses à propos de mon ami d'enfance, dans le style "si tu t'étais fait un film ?". Mais elle faisait marche arrière en disant : "oui mais tout de même il a fait ça et ça, donc..."

Une grande rêveuse très attachée à son ami d'enfance qui lui n'a jamais rien ressenti pour elle.

Ce n'est pas seulement à cause de mon histoire avec Alexis que les choses que les choses ont commencé à se dégrader avec mon amie, c'est un ensemble de choses. Enfin se dégrader, n'exagérons rien. Disons que j'ai commencé à ouvrir les yeux.

J'allais de mieux en mieux. Sortie de mes années de galère, je redevenais souriante, sociable. Nathanaëlle me disait parfois "tu me voles la vedette".

Dans toute plaisanterie il y a une vérité cachée... J'y crois dur comme fer...
D'ailleurs je suis la première à faire passer par l'humour les choses que je pourrais dire plus méchamment.

Je n'ai jamais su pourquoi Nathanaëlle aimait tant les confidences, et pourquoi elle se plaisait tant à jouer les psys avec tout le monde, mais j'ai très vite su que je devenais moins intéressante, voire dangereuse. J'avais droit de plus en plus à des petites réflexions "le rose ce n'est pas un peu jeune pour toi ?".

Et puis sans doute que moi aussi je me mettais à analyser, à regarder de plus près. Je parlais beaucoup avec Annette, en âge d'être ma mère, qui ne l'aimait pas. Pour Annette j'étais sa "protégée", mais elle disait aussi de moi : "Louisianne n'a pas peur de dire M.. si elle en a envie, et ça Nathanaëlle ne saura jamais le faire"...

Elle reprochait à Nathanaëlle son côté "m'as tu vu", son côté mondain. Elle lui reprochait de passer plus de temps à se mettre en valeur et à bavarder qu'à travailler. Ce qui n'était pas faux. Nathanaëlle était responsable d'une petite équipe : la nôtre (Fred, Annette, deux personnes et moi). Ça ne signifiait pas grand chose, vu que nous avions tous le même travail, c'était juste pour veiller au grain, car le chef M. Jeufairien n'avait pas le temps de nous surveiller.

J'ai toujours eu un côté bienveillant pour les amis. Je peux être parfaitement consciente de leurs défauts, sans que cela me dérange. Elle ne bossait pas et alors ? Je n'étais pas son chef, je n'étais pas sa mère, je ne faisais pas son boulot, et on ne change pas les gens. Jusqu'à maintenant j'avais vaguement entendu sans écouter les critiques sur Nathanaëlle, (ça me paraissait normal, on a pas une responsabilité si petite soit-elle sans être critiqué).

Mais au fur et à mesure où j'ouvrais les yeux, j'écoutais plus, ou peut-être tout bêtement qu'on me parlait plus, parce que les gens devaient sentir que je n'étais plus une inconditionnelle de Nathanaëlle.

Nathanaëlle fit une vacherie à Fred qui travaillait avec nous. Il n'était pas parfait, mais M. Jeufairien l'aimait bien.  Nathanaëlle dit pis que pendre de lui à M. Jeufairien qui avait pleine confiance en elle. Le chef changea de regard... Je n'approuvais pas du tout ça. Je le lui dis, et écoutait patiemment les doléances de Fred. Et tout ça pour quoi ? Pour gagner quoi ?

Après Fred elle choisit une autre bête noire parmi les collègues. Elle se défoulait régulièrement derrière le dos de la personne en question. Quant à moi j'étais son alliée, sa préférée, rôle dont je voulais de moins en moins. Je déteste les traitements de faveur.

Le jour où Alexis m'a appelée chez moi, il m'a dit qu'il avait appelé au bureau une semaine plus tôt et qu'il était tombé sur Nathanaëlle, un mercredi et je ne travaillais pas.

Je fus un peu surprise et lui dis : "elle ne me l'a pas dit". Il fut surpris aussi, mais ne s'étendit pas sur la question. Il l'aimait bien, et en parlait parfois durant le mois où nous n'étions que deux au bureau.
Déjà lucide, je ne lui avais jamais dit qu'elle était une compagnie agréable, mais qu'elle ne lui apporterait rien, ç'aurait été mesquin.  Il serait bien assez grand pour le voir tout seul. Et en effet il l'a su à ce moment. En réalité il avait appelé un numéro au bureau au hasard, il avait d'abord parlé à Fred, puis à Nathanaëlle. Il était comme un gamin qui n'ose pas appeler. Il avait répété plusieurs fois : "ah c'est vrai Louisianne ne travaille pas le mercredi". Et il avait sûrement été surpris par la froideur de mon amie, pour elle Alexis était aux oubliettes. Elle m'a dit elle même : "ça m'étonnerait qu'il me rappelle". En y réfléchissant, je me suis rappelée que Nathanaëlle, sans doute coupable, m'avait demandé plusieurs fois si Alexis avait mon numéro chez moi.

J'ai fait comme si de rien n'était au début. J'ai dit à mon amie : "chouette il m'a appelée" comme j'aurais fait en temps normal. Puis après je l'ai mise au pied du mur : "mais pourquoi tu ne m'as rien dit ? "

Elle m'a alors expliqué que c'était pour ne pas me faire souffrir, parce que j'aurais été jalouse qu'il l'appelle, elle....
(je rappelle qu'il ne l'avait pas appelée elle).

Là je suis tombée des nues : jalouse moi ?
Jalouse après ce que j'avais vécu avec lui ?  Ce monde merveilleux où elle n'aura jamais accès ?
Jalouse alors que j'ai tout de suite compris "le petit prince qui n'ose pas appeler, qui a peur de se faire jeter"...

Bien sûr je lui ai dit ça tout de suite : "Jalouse, mais ce n'est pas mon caractère ! Et même si c'était vrai, c'était à moi de gérer ça, tu n'avais pas à me cacher l'information".

Mais là bien sûr c'était le commencement de la fin. Laquelle des deux était jalouse finalement ?
Je ne lui en voulais pas seulement de cette gaffe. Je me disais qu'elle n'avait rien compris à ce que j'étais, à notre relation après toutes ces années. C'était une belle femme, donc j'aurais du être jalouse, même si je ne l'étais pas ?

Puis les choses ont changé. Un homme, Patrice et son équipe sont venus travailler à côte de nous, déménagement de bureau. Elle le connaissait, c'était un ex-collègue de son mari. Patrice était un méditerranéen, gai, ouvert, sociable. Pour un projet j'ai du travailler avec lui. Il était marié et la relation était professionnelle, mais nous nous sommes entendu comme deux larrons en foire.
Il m'invitait souvent avec son équipe à déjeuner à la cantine avec eux, ils avaient des horaires complètement décalés...