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Quand j’étais petite, certains métiers étaient dotés d’une aura.

Un certain prestige, un certain savoir. Comme si la charge conférait le talent à celui qui le détient.

L’instituteur, l’institutrice, le directeur ou la directrice de l’école. Le facteur mais oui ! À tel point que Martine rêvait d’épouser un facteur, vu qu’elle travaillait à la poste, la pauvre a épousé son chef un inspecteur !

Le receveur des postes également. D’ailleurs je me demande toujours pourquoi dans “Bienvenue chez les ch’tis” ils ont triché en disant “le directeur de la poste” comme si le terme “receveur” n’était pas connu du grand public ! Et même si il ne l’avait pas été, c’était justement l’occasion de le faire connaître.

Et bien sûr il y a tous les notables, le maire et son adjoint, même si la commune n’a que 30 habitants, le capitaine de gendarmerie, le commissaire. Comment ça je ne parle que des fonctionnaires ? Et alors ! Je suis d’une famille de fonctionnaire !

Rassurez vous : il y a aussi l’aura du médecin et du pharmacien !

Mais je m’égare, comme d’hab. Revenons donc aux instits. J’ai donc été élevée dans le respect du maître ou de la maîtresse. Que je croyais naïvement dotée de la connaissance universelle, ou a défaut d’un niveau de culture correct. Ce qui était loin d’être le cas à l’époque !

Si la maternelle s’est plutôt bien passée, je garde plutôt un souvenir proche du cauchemar de l’école primaire. En dehors des deux dernières années où j’ai eu la chance d’avoir une maîtresse adorable, si c’était à refaire, ce serait sans moi, merci !

Les deux maîtresses qui m’ont torturée (surtout une qui m’a prise comme souffre douleur) étaient d’authentiques débiles, j’ai rencontré la pire alors que j’avais une vingtaine d’années et je regrette encore de ne pas lui avoir fait un croc en jambe ou dit ses quatre vérités. J’étais encore trop timide à l’époque. J’espère qu’elle grille en enfer à l’heure qu’il est !

J’ai reproché plus tard à mes parents leur tiédasse réaction, mais c’était comme ça, l’adulte avait toujours raison, et vu que j’étais une élève (non pas paresseuse) mais grande rêveuse, j’avais sûrement tort et l’instit surement raison de “me secouer”.

Mais je m’égare de nouveau, quelle bavarde je fais !

Toujours est-il que malgré la personnalité totalement tordue de certaines, je continuais à penser qu’un instit, prof ou autre, était quelqu’un de relativement cultivé, à priori bien élevé et intégré dans la société.

Cette idée ne m’avait guère quittée, et ayant pardonné leurs fautes aux méchantes, j’aurais même été capable d’être amie avec une instit, d’ailleurs il m’est arrivé de sympathise avec une prof de maths, c’est dire !

Et j’ai été déçue. Attention je n’ai pas dit (n’est ce pas Tilleul) que tout le monde est à ranger dans le même sac !

Mon amie Nathanaëlle était fille d’instit. Elle me disait que les instits vivaient souvent en autarcie, entre eux, qu’ils ne choisissaient pas leurs amis ailleurs que dans l’éducation nationale. C’était peut être plus vrai pour cette génération, mais c’est quelque chose que j’ai déjà entendu.

Puis vint le jour, particulièrement horrible, où je dus me résoudre à inscrire mes filles à l’école. La pieuvre (comme le dit Alexandre Jardin dans un de ses livres) allait me les prendre !

J’en faisais des cauchemars, si j’avais été riche, je leur aurais payé un “répétiteur” à la maison, mais ce n’était pas le cas. Je fis taire mes angoisses, et je constatais bien vite, soulagée, que l’école avait bien changé, et que personne n’allait torturer mes filles. Mes relations avec le corps enseignant ont toujours été correctes, même si j’ai toujours “redouté” et je redoute encore être convoquée

C’est vrai quoi, pourquoi ce serait toujours la faute des parents ?

Pourtant c’est à ces occasions que j’ai vu de plus près les instits ou profs et que j’ai été déçue ! Le prof qui vous conseille une orientation pour votre fille (orientation qui n’existe plus) l’encourage un jour à passer en seconde, la décourage le lendemain. La prof qui en 5ième veut mettre tout le monde en apprentissage, comme dans les années 40. La prof pour qui il n ‘existe que des bons ou des mauvais, et rien au milieu !

Un jour alors qu’Artémis était en CP, je suis convoquée par son maître, qui est aussi le directeur. Pour parler un peu d’elle, de ses petits problèmes.

Discussion tout à fait normale, il me pose des questions, je réponds. Il en conclut que Artémis manque d’autonomie et qu’il va falloir qu’il travaille là dessus. Je suis plutôt contente, il a l’air de prendre sa tache au sérieux.

Il me dit “je vais marquer autonomie”. Il écrit le mot autonomie sur son éphéméride. Je trouve cela un peu bizarre comme pense bête (sans même le prénom de ma fille) et que va devenir ce pense bête, lundi quand il aura tourné la page ?

Il me dit qu’on en reparlera. Éphéméride ou pas, je me dis que je verrais bien le résultat.

Je n’ai jamais vu de résultat et nous n’en avons jamais reparlé !