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Dimanche matin commençait relativement bien. Levée tard parce que j’ai beaucoup dansé la veille. Je traîne un peu pour m’habiller, je papote avec Jérémy et Artémis. Puis je vais faire quelques courses.

Dans la matinée, un mini clash, encore une dispute avec les enfants. Toujours pour les mêmes raisons : ils prennent trop leur aise, oublient qu’ils sont chez moi et pas moi chez eux !

Du coup je ne leur parle plus, je ne mange pas. Mais j’en ai assez. Je me sens mal, seule, incomprise, j’en ai marre de tout, j’ai trop l’impression de ne pas exister.

En début d’après midi nous devons partir pour l’anniversaire de Manivelle. Bien sûr je reparle, je ne suis pas du genre à bouder longtemps. 

Nous arrivons chez Servane et Pierre. Très vite les autres arrivent. Cédric, Mariane avec Martine, Camomille et Jean-Louis. Ces deux derniers viennent de passer un week-end à Londres pour leur anniversaire de mariage. Du coup tout le monde parle de Londres. Tous les couples y sont allés au moins deux fois dans les dernières années.

Moi je n’y suis pas allé depuis des siècles, je ne me souviens de rien. Je me sens un peu exclue. 

Ce n’est pas seulement l’argent, même si… J’ai toujours rêvé de voyager, et je ne peux pas… Bien sûr je pourrais peut être, un week-end à Londres, ça doit être faisable.
Sauf qu’ils sont tous en couple, pas moi. Et puis question voyages, ils auront toujours dix longueurs d’avance ! Même Servane qui ne voyageait jamais avec son ex mari, s’est largement rattrapée depuis !

Selon son habitude, Martine qui ne peut pas participer non plus à la conversation, se rapproche de moi et tente de m’embarquer dans une conversation bidon, un sujet déjà cent fois exploité, qui n’intéresse personne, et pourrait être “traité” ailleurs qu’ici.

Cela m’agace encore plus, et renforce encore mon impression de me sentir “laissée pour compte”.
Et je n’ai nul besoin de ma mère pour en rajouter une couche ! 


Car si ma mère a la vie qu’elle a, c’est entièrement de sa faute ! Je ne lui ressemble pas, je ne veux pas lui ressembler et je ne veux surtout pas qu’elle pense qu’il y a une espèce de connivence entre nous, ou pire qu’elle me prenne en pitié ! Ce n’est pas parce que je ne parle pas, que je n’écoute pas !

Ensuite mes deux beaufs comparent leurs Aïe-Fone 5, là j’avoue que je m’en fiche, car je n’ai pas envie de changer !
Par contre quand ils se mettent à parler de leurs motos, le petit “plus” car chaque famille a déjà deux voitures (celle de madame et celle de la famille), je soupire intérieurement en me disant que demain j’ai rendez vous chez le garagiste, pour un petit truc qui va encore me coûter trop cher, et je me dis que moi aussi j’aimerais bien changer de voiture ! 

Ensuite on parle d’autres choses, la malaise passe plus ou moins. Mais je me dis que plutôt que d’être contente de voir ma tribu, je vis mal ce moment. Mes petits djeuns parlent peu.

Au moment de partir, Camomille me dit de noter dans mon agenda la date de son anniversaire, elle va faire une fête en  juin. Je prends un grand coup de vieux ! Non ce n’est pas possible ! Nous ne pouvons pas être aussi vieux !
Et bien sûr ils fêteront aussi leur anniversaire de mariage. Il y a des couples qui tiennent ! Comment font-ils ?
Cédric et Camomille sont mariés depuis des siècles. Servane, abandonnée par son mari, s’est remariée depuis…

Dans la voiture, je parle aux petits. Je leur dis qu’il y a des choses qui doivent changer.

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Quand je rentre, j’ai envie de m’allonger.

Il faut que je réfléchisse. Je n’aime pas ça. Je n’ai pas aimé ce sentiment de “laissée pour compte”. Je n’ai pas aimé ce sentiment de n’être pas “comme les autres”.
Qu’est ce qu’il y a ma vieille ? Tu ne devrais pas ressentir ça, tu n’as plus 10 ans ! Oui j’aime bien me parler à moi-même !

Je ne suis pas envieuse, je me moque de l’argent. Avoir ressenti ce sentiment m’agace, même si c’est légitime après tout. Mon frère, mes sœurs et moi avons tous des salaires similaires. Il n’y a pas d’énormes différences entre nous. Si j’étais assistante maternelle et tous les autres chefs d’entreprises, sans doute que je trouverais ça normal !

Mais je sais bien que ce n’est pas l’argent le problème. La solitude plutôt, le fait de se demander toujours pourquoi les autres et pas moi.

Le plus incroyable est que j’aime ma vie ! Samedi soir encore je m’en félicitais, j’étais contente d’être avec ma bande de copains à une soirée dansante.

Alors pourquoi ma tribu fait-elle cet effet sur moi ? Me ramène t-elle en arrière ? Touche t-elle à quelque chose d’enfoui, de douloureux ?
Je pensais pourtant avoir suffisamment grandi pour ne plus ressentir tout ça !

Est ce qu’inconsciemment je voudrais ressembler à une image ? Pas mon image, mais celle qui “collerait” à ma tribu ? J’aurais comme Servane retrouvé très vite un homme ?
Et moi aussi j’irais à Londres et je connaîtrais les quartiers par cœur !

Martine a t-elle eu un rôle plus qu’important là dedans ? Peut-être est-ce elle qui est persuadée que je suis “laissée pour compte” parce que je ne vis pas comme les autres, je ne rentre pas dans les cases!
Ce n’est pas trop grave aujourd’hui… Mais peut-être que ça l’a été, peut-être qu’enfant j’ai subi inconsciemment cette pression !

Plus tard, je suis assise sur le canapé et le téléphone sonne. C’est Cédric. Il veut juste m’embrasser, me parler, me demander si ça va, parce qu’on a pas eu le temps de parler. Je discute 5 minutes et je raccroche.

Je souris. Je me dis que c’est à la fois gai et triste : il y a tant d’hommes qui m’aiment… Mais pourquoi pas un seul ?