cafe_louisianneNous sommes très occupés, Laurent et moi à prépare la salle pour le grand soir. Alban est arrivé avant tous les autres en moto. Ma cousine Sophie me prend à part pour me dire :
- Qu'il est beau ! Ah qu'il est beau !

Ça me fait toujours sourire quand une fille tombe en admiration devant Alban. C'est un peu comme si j'avais oublié qu'il est beau ! Chérubin représente pour moi beaucoup de choses, c'est une relation à part. C'est tout sauf un nom sur une liste, un trophée à ajouter à un tableau de chasse.

À un moment je vais chercher quelque chose dans ma chambre. Elle est fermée à clé. Je proteste et tambourine à la porte. Finalement on m'ouvre, je surprends Alban et Sophie dans une tenue compromettante. Ma cousine, catastrophée, disparaît en courant et en se reboutonnant. Alban lui n'est pas du tout gêné. Il me demande si il y a un problème :
- non pas de problèmes, mais c'est ma chambre ! Choisis un autre endroit !

Ma cousine plus tard, vient me parler, elle a cru à une scène de jalousie : je lui répète que la seule chose dont je suis jalouse c'est mon territoire et que la prochaine fois elle demande la permission avant d'investir ma chambre !
Puis la soirée se déroule comme toutes les soirées. À la fin nous nous retrouvons à 10 à dormir dans la chambre. Alban et ma cousine dorment par terre. Plus tard ma cousine me racontera sa première fois.
Je suis plutôt étonnée. Qu'ils choisissent un endroit pareil, qu'elle ait été si rapide pour se jeter sur Alban.
Je suis étonnée d'Alban aussi. Lui si patient, si délicat... Ce n'est pas l'Alban que je connais.

Puis l'été suivant arrive. Au début des vacances, Camomille et moi allons en discothèque. Le temps des bals est fini. Ça ne marche plus, la moyenne d'âge est de 13 ans, c'est le temps des disco mobiles. Quelques villages tirent encore leur épingle du jeu avec les concerts. Mais c'est un grand regret pour moi qui ne suis allée en discothèque que pour suivre le mouvement ou plus souvent parce que j'étais le chauffeur.

Ce soir là nous croisons Alban avec un copain. Le copain plaît bien à ma soeur.  Et je me retrouve assise avec Alban à nous raconter des tas de choses, comme chaque année quand nous nous retrouvons.
Des années après j'ai entendu la chanson Un samedi soir sur la terre... Et j'ai repensé à cette soirée, on aurait dit que la chanson avait été écrite pour nous...

Il arrive, elle le voit, elle le veut, et ses yeux font le reste....

La musique est forte, l'endroit n'est pas idéal pour parler.

 Ils se parlent, ils se frôlent, ils savent bien
qu'il va falloir qu'ils sortent
Ils sont obligés de se toucher, tellement la musique est forte...
Après c'est juste une aventure qui commence sur le siège arrière d'une voiture...

Il ne m'avait jamais rien demandé, il ne s'était jamais montré insistant. Il avait simplement senti qu'un jour c'était le bon moment, un samedi soir sur la terre...

Pas la peine que je précise,
D'où ils viennent et ce qu'ils se disent
C'est une histoire d'enfant,
une histoire ordinaire
On est tout simplement, simplement
un samedi soir sur la terre.

Et comme dit la chanson : on en ferait autant si c'était à refaire...

Cet été là était comme les autres. Juste un peu différent. Je sortais avec Camomille et Patou. Elles cherchaient un flirt pour la soirée. J'étais plus âgée et je commençais à me lasser de ce petit jeu.
Que la pêche soit bonne ou non, finir la soirée avec un lourdingue ou un ennuyeux, ou se rendre compte une fois les lumières rallumées qu'on a fait une bêtise, ce n'était plus vraiment mon trip.
Mais pour moi la question ne se posait plus. Si Alban était libre, je passais la soirée avec lui. L'occasion faisait le larron. Ma soeur et ma copine se moquaient de moi : encore !
Mais moi je les plaignais ! J'étais mieux avec Chérubin, sûre de passer une bonne soirée !
Nous ne cachions plus vraiment. Il n'y avait plus de bande de copain du village. Et sans doute que nous n'avions plus l'âge de nous demander ce qu'on allait penser de nous !  

Pourtant notre relation n'avait pas changé. Nous étions toujours des copains. Nous n'étions pas, n'avons jamais été ensemble.