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Il est temps que je donne des nouvelles de Martine et ma tribu. Je parle de cœur dans le titre, car c’est bien de mon cœur et de mes sentiments qu’il s’agit, mais ne vous attendez pas à des confidences sur mon histoire d’amour.

Nous avons vécu ma tribu et moi une période très difficile qui n’est pas encore terminée. Martine a passé un mois en réanimation.
Et comme disait le médecin : en réa ça change tous les jours. Elle a subi quatre opérations, et les périodes d’espoir alternaient avec les périodes d’angoisse, même si on a nous a assuré très vite que Martine ne va pas mourir, mais ça va être très long et très difficile.

Entre les périodes où elle semblait calme, malgré le fait qu’elle n’ait pas toute sa tête, et les périodes où elle était très agitée, cherchant à arracher les tuyaux, à s’en aller, périodes qui annonçaient une infection et une Nième opération.

Le moral des troupes est en dent de scie, souvent plus bas que haut. Épuisés par toutes nos visites, alors que bien sûr nous travaillons tous et nous avons toujours nos activités, les jours où nous sortons de l’hôpital démoralisés, les rares jours où nous n’y allons pas et que nous culpabilisons. Les jours où Martine dormait profondément et où on repart un peu dépités, mais ça vaut mieux que quand elle souffre.

Je me souviens de ce rendez vous avec le médecin, un dimanche, le médecin voulait nous voir tous les 4 mais tout le monde s’était décommandé, entre ceux qui étaient trop fatigués, ceux qui avaient peur d’entendre les détails. J’étais avec Artémis, elle avait son bloc-note et notait tout, elle avait aussi une liste de questions. Cela a duré plus d’une heure.

Les SMS de groupe : je viens de quitter maman, elle est comme ça et comme ça.

Ses deux sœurs viennent régulièrement la voir, et on s’appelle aussi pour donner des nouvelles. Petit à petit nous avons prévenu d’autres membres de la famille plus élargie. Quand on pense que ça ne va durer longtemps on ne prévient pas tout le monde.

En plus de la maladie, le fait qu’elle n’ait pas toute sa tête est très inquiétant. On apprend que la maladie déshinibe, Martine qui n’a jamais dit le moindre gros mot, même pas Q, dit des grossiéretés. Et quand elle dit deux phrases cohérentes, on a droit à 10 phrases incohérentes, des mélanges de prénoms,des souvenirs obscurs, des histoires abracadabrantes, ça on ne peut pas dire elle est toujours aussi bavarde !

Et quand je dis cohérente, façon de parler : elle nous dit qu’elle a mal dormi qu’on lui fait des prises de sang tous les jours : ils me volent mon sang, ils font des expériences sur moi !
Elle demande quel jour on est, et quelle heure il est.

Mais ce n’est plus une personne ” normale “, impossible de lui expliquer ce qu’elle a eu, ce qui va se passer ensuite. Souvent elle déprime, pleure : je suis foutue, je ne veux pas mourir, je ne m’en sortirai pas ça ne vaut pas le coup.

Hier quand je l’ai vue elle en voulait à ses enfants, elle disait qu’on a voulu se débarasser d’elle pour avoir la paix, elle parle d’une maison avec un terrain, qu’on a voulu la mettre là pour se débarasser. J’essayais de la raisonner de lui dire qu’elle habite à Ville Natale, qu’on veut qu’elle revienne que personne ne veut se débarasser d’elle.

Elle m’a demandé si j’avais bien sa valise dans ma voiture, si j’avais pris un grand sac pour la ramener. Plusieurs fois en mon absence elle a réclamé Louisianne pour la ramener chez elle. Comme quoi Martine n’a pas oublié qui est son chauffeur !

Comme toujours elle est gâteuse avec ses petits enfants, plus attentive qu’avec ses propres enfants.

Après 2 scanners, un electro encephalogrammre, et un IRM hier on nous a assuré qu’elle n’a rien au cerveau, on nous a dit pour la Nième fois que sa confusion vient de l’infection, du séjour en réa, qu’elle va retrouver sa cohérence… Mais quand ?  Ça peut être long ou court.

Nous ne savons plus si nous devons espérer. Cela fait un mois que nous ne pouvons plus parler à notre mère. Ça fait drôle.

Depuis deux jours elle a enfin quitté la réanimation pour une chambre ” normale “. Là les choses se précipitent un peu, on nous demande déjà ce que nous avons prévu pour la suite, maison de convalescence ou retour à la maison.

Le retour à la maison semble impossible à envisager, Martine n’a pas la force de marcher, elle ne mange pas, elle est encore nourrie par un tuyau. Je dois rencontrer l’assistance sociale avec mon frère pour faire un choix. Elle ne sera pas transférée avant une dizaine de jours, mais les places sont rares.

D’autres problèmes en vue, Martine va nous en vouloir encore plus ! Et puis vu la taille de notre département, elle peut se retrouver au fin fond de la campagne, et avec les horaires de visite, impossible d’aller la voir le soir après le travail.

J’espèrais vraiment qu’elle serait remise d’ici l’été pour l’emmener à la Sauvageonne mais je suis de plus en plus pessimiste.

En avril je ne partirai pas une semaine, je vais juste passer deux jours à la Sauvageonne puis je vais chez Athéna et Jim. Artémis et Jéremy partent deux semaines pour faire des travaux dans leur future maison.

Je continue à faire des cartons et à ranger, mais je suis toujours aussi découragée en me disant que je n’y arriverais jamais.