Martine m’avait déjà raconté cette histoire il y a longtemps. Je l’avais oubliée.

Une des cousins de sa famille a fait des recherches généalogiques. C’est ainsi que Martine m’a montré plein de photos, et m’a reparlé de cette histoire que j’avais oubliée. 

J’ai déjà parlé de ma grand mère maternelle Jeanne.

Jeanne, son mari Jeannot et leur dix enfants vivaient dans cette petite ville de cheminots pendant la guerre. Dans cette petite ville, on avertissait les citoyens des bombardement avec un mégaphone, on leur disait “tous aux abris”. D’abris ils n’en avaient pas bien sur, hormis les caves. Martine se souvient de ce fameux jour, où on a évacué toute la population : la gare de triage va être bombardée !
C’est ainsi que toute la famille est partie sur les routes en Normandie.

On a demandé à mes grands parents pourquoi ils avaient fait un tel choix, aller se réfugier en Normandie quand on connait la suite des événements : tout bêtement parce qu’ils étaient normands, que la famille susceptible de les héberger était là bas ! Et bien sûr personne ne savait où aurait lieu le débarquement !

Mon grand père je l’ai dit, avait tout du viking. Grand, costaud, de grands yeux bleus à fleur de tête, je ne l’ai connu qu’avec une abondante chevelure grise, mais il était blond.

La sœur de Jeanne était également mariée avec un normand. Elle vivait dans la même ville que sa sœur, avec son mari, lui aussi un grand blond, avec des yeux d’un bleu très pur, appelons le Marcel. Leurs enfants étaient déjà grands à  la fin de la guerre.

La guerre était finie, les américains étaient à la recherche des allemands qui n’étaient pas partis. Ils se cachaient, peut-être même parmi la population. Dans la rue où habitent Jeanne et sa sœur, une nouvelle alerte : on leur dit de s’abriter, et ils savent pourquoi. 

Que s’est il passé ce jour là ? Marcel a 45 ans, est il déjà dur d’oreille ? Pas impossible, après les bombardements. Toujours est-il que Marcel n’a rien entendu, il continue à jardiner dans son potager.

Voyant un grand blond qui jardine, les américains en concluent que c’est un allemand, et tirent sans sommation.

Le pauvre homme y laissera sa vie. Triste histoire, lamentable, quand on sait que les autres vrais allemands débusqués ont été fait prisonnier, mais pas tirés comme des lapins.

Lamentable cliché aussi, il suffit d’aller en Allemagne pour voir qu’ils ne sont pas tous des grands blonds aux yeux bleus, comme on le croyait à l’époque.

La sœur de Jeanne, ne se remettra jamais de la mort stupide de son mari.