Je suis dans la deuxième phase de mes grandes vacances. De mes vacances tout court puisque les grandes vacances, c’est maintenant pour toujours.

Je suis installée chez Athéna et Jim qui sont partis 3 semaines pour un road trip en Californie. Je garde Rocky, adorable pot de colle. Hélas je ne peux pas le balader, ni l’emmener en voiture, car il est mignon tout le temps, mais ingérable quand il voit un chat. Comme il a une force herculéenne il a déjà fait tomber ma fille pourtant grande et musclée, et mon gendre qui a une carrure de rugbyman a du mal à le retenir. Une fois qu’il est parti, il faut lui courir après pendant 20 minutes, pour lui c’est un jeu, il regarde ses maîtres et repart en courant ! 
Bref Athéna a peur pour moi et pour son chien. Dommage car j’espérais partir les week-ends à la Sauvageonne avec Rocky. Mais bien sûr je peux partir seule la journée, Rocky est habitué à ce que ses maîtres travaillent.

Athéna qui n’a pris l’avion qu’une fois m’a donné des instructions au cas où ! Quelle drôle d’idée de travailler dans les pompes funèbres, elle savait même qui devrait s’occuper du rapatriement, de la crémation etc ! Les parents de Jim seront chargés du toutou, comme a dit la mère de Jim :
- Interdiction de vous crasher ou je ne vous parle plus ! 

Mais revenons à nos vacances ! 
J’ai passé deux mois et demi à la Sauvageonne, je n’ai jamais été aussi bronzée. Avant l’époque des canicules, il y avait des années de temps mitigé, et je n’avais pas le temps d’arriver ” à mon top ” comme dit Artémis. Maintenant ce sera le fait de ” débronzer ” qui me paraîtra bizarre ! 

Durant cette période j’ai eu des têtes à tête avec Martine, des semaines avec la tribu, et beaucoup de bon temps avec Artémis qui vient souvent avec sa chienne Shiva, chienne de chasse adorable. Artémis adore les balades autour de la Sauvageonne. Le paysage est très sauvage, et on y croise personne. Chez elle c’est plus plat et il y a des marcheurs, des vélos, pas du tout la même ambiance.

Martine a été inbuvable. C’est un peu le cas tous les ans, comme a dit je ne sais qui : quand elle est seule elle s’ennuie, quand on est là elle ne nous supporte pas !
Camomille a dit aussi : nos parents deviennent odieux en vieillissant pour ne pas qu’on les regrette ! 
Martine a perdu son petit frère début juillet, il était malade depuis longtemps, et demandait même que l’on prie pour qu’il parte rapidement. Martine avait perdu au printemps un autre frère. Certes c’est triste, le deuil n’est jamais facile, mais cela lui sert d’excuse pour être désagréable. 
Le matin elle se lève, traverse la pièce sans dire bonjour, elle n’a pas ses appareils auditifs, mais comme je lui ai dit : tu n’es pas muette, dis bonjour même si tu n’entends pas la réponse !
Elle ne fait plus rien, ça se comprends, donc nous préparons les repas. Trois fois par jour elle dit : qu’est-ce qu’on mange ?
Une fois qu’elle a mangé, elle quitte la table sans un mot ” j’ai fait mon devoir “. Alors que tout le monde comprendrait qu’elle dise ” je suis fatiguée, je vais me reposer ” ou mieux ” merci c’était bon “.
Ce qui paraît ” moyen ” quand nous sommes nombreux, est insupportable quand je suis seule avec elle ! Moi qui n’aime pas faire la cuisine : qu’est ce qu’on mange ? Je n’en sais rien, on verra bien !
Sa façon de donner des ordres : fais moi un café, mets moi la radio. Attention seulement à ses filles, on ne fait pas travailler le fiston dans sa génération !
Elle perd tout, son portable, son chargeur, quand on l’aide à chercher en lui disant : ” tu devrais toujours tout remettre à la même place “ elle le prend mal. J’ai fini par attacher le chargeur au montant du lit ! Je ne peux pas lui attacher le portable autour du cou, dommage ! 
Et je passe le couplet sur son côté parano, les méchancetés qu’elle dit sur telle ou telle personne, en inventant des bonnes raisons pour leur en vouloir. Le couplet multiplié par 4 car elle répète 4 fois les mêmes choses !
Le fait qu’on ne peut pas avoir une seule conversation, Madame MoiJe réponds toujours MoiJe : 
- il va faire très chaud demain.
- Moi je n’ai jamais chaud ! 
Les petites manies : fermer tous les placards même si ils sont déjà fermés, fermer les volets le soir au moment où on peut enfin respirer. 

Comme elle perd de plus en plus la tête, Athéna voulait qu’elle vienne avec moi garder Rocky plutôt que rester seule à la Sauvageonne en septembre. Pour sa sécurité bien sûr, pas pour mon plaisir, moi je suis très bien sans elle ! Martine n’a rien voulu entendre. 

Pour couronner le tout, Martine est très possessive (elle ne peut plus être intrusive vu que je ne lui raconte plus rien). J’ai droit à ” tu es où ” par sms 4 fois par jour, alors que je la préviens toujours si je pars en voiture ou en balade à pied avec Artémis. 
Tu es où ?  à la piscine soit 200 m ! 
Quand ce n’est pas par sms c’est oralement.
 Tu t’es baignée, tu vas à Petite Colline, tu fais la sieste où, tu viens pas boire un café avec moi ? 
Pourquoi tu t’en vas quand j’arrive ? Parce que ça fait deux heures que je suis au soleil et que j’ai envie d’aller à l’ombre !

Elle me téléphone quand je suis sous la douche, m’envoie un sms : ” viens me voir ” quand je fais la sieste, et le plus souvent c’est pour me dire quelque chose qu’elle m’a dit déjà 3 fois où elle a oublié ce qu’elle voulait me dire. 
Quand elle ne débarque pas dans ma chambre pour me dire ” tu es au courant qu’on est samedi ? Demain c’est dimanche ! “
Alors qu’on est mercredi ! 
Malgré l’éphéméride dans sa chambre et les 3 calendriers dans la salle à manger ” quel jour on est “ c’est un problème !
Heureusement elle dort beaucoup, la moindre tâche la fatigue. J’en ai parlé avec des amies : ” ma mère ne comprenait plus rien en vieillissant, elle s’emmêlait les pinceaux “.
J’ai dit à Artémis : les vieux redeviennent des bébés : manger, dormir, il ne manque que les couches ! 

Bref comme dirait Martine, c’est la dernière fois qu’elle restera seule, elle dit aussi qu’elle ne viendra plus à la Sauvageonne, qui vivra verra. Nous avons mis en place le service ” veillez sur nos parents ” de la poste. La factrice passera les mardi et vendredi. Ce week-end Artémis l’a emmenée chez elle, mon frère Cédric et sa femme vont descendre le week-end suivant, ensuite encore Artémis et le 24 septembre, OUF ! Fermeture de la Sauvageonne et Martine remonte avec mon frère. 
Je ne remonte pas. C’est peut-être pour ça que Martine et si collante !

On me demande souvent ce que ça me fait d’être en retraite.
Rien. Ce qui me fait drôle c’est d’être nomade, de ne pas avoir encore de ” chez moi “. De savoir tous mes meubles et mes trésors dans un box. 
Depuis que je suis au Sud de RoseVilleduSud la Sauvageonne me manque même si la présence de Martine était difficile à supporter. Le temps était lent, j’ai passé des super moments avec Artémis et Jérémy et aussi Jolinette et son mari qui sont venus un week-end. Nous avons même pu sortir les fêtes de village ont repris. 
Comme d’habitude les jeunes sont plus agréables que ” les vieux ” : ma fratrie. Chris et sa femme ont une adorabe petite fille de un an, toute bronzée, ils sont restés une semaine. 

Et puis la Sauvageonne je suis chez moi. 

Il fait toujours chaud, c’est une chance. Ici je sais que le temps va être lent. Je n’ai pas grand chose à faire, c’est comme ça quand on est pas chez soi. Je me suis inscrite pour des cours d’essai dans ma future ville, danse, théâtre. J’ai hâte de me mettre à toutes ces activités. Mais RoseVilleduSud c’est 40 minutes de route, un peu décourageant, même si je n’ai pas à me lever le lendemain. Pour visiter des appartements et pour le reste, ça va être une expédition. 

Le fait de ne pas encore avoir mon chez moi est une petite source d’angoisse. Bien sûr cela ne m’empêche pas de dormir, mais j’ai hâte d’être fixée sur mon sort.

Et puis j’ai eu des soucis de santé, j’en ferai un billet, celui là est déjà long ! Je suis suivie dans une autre ville Pruneau, là où travaille Artémis.

Donc là le temps va me paraître long, ça me permet de penser à ma future vie. Comment vais-je occuper mes journées ?
Même si le rangement d’après déménagement va m’ocuper un bon moment ! 

Je profite du soleil, l’automne va venir doucement, j’ai perdu l’habitude des vêtements d’hiver.