Le lendemain dès l’aube j’appelle l’assurance pour qu’on m’envoie une dépanneuse. Nous sommes sur le parking du cimetière, Jérémy a tenu à m’accompagner.

Je vide le contenu de ma voiture dans de grands sacs. Je m’installe une dernière fois au volant. Tant de kilomètres, tant d’heures d’attente, tant d’aventures, presque dix ans !

Je m’attache aux voitures, j’ai toujours un mal fou à les voir partir à la casse. Même si on m’offrait une rolls, ça ne changerait rien. Je les use jusqu’à la corde, je ne les ai jamais revendues, au pire je les donne à quelqu’un que je connais bien.

- Je n’ai jamais cassé mes voitures !

- Là ce n’est pas toi, c’est le sanglier !

Le dépanneur arrive, Jérémy l’aide à monter ma voiture sur un plateau. Elle n’est presque pas abîmée !

Jérémy et le dépanneur parlent de la route machin qui est fermée à cause des travaux, du bled dont vient le dépanneur. Ils parlent de banalités alors que ma voiture part pour son dernier voyage ! Je pleure.

Quand Jérémy monte dans sa voiture où je suis assise et qu’il m’entend pleurer, il me dit : c’est du matériel !

Bien une parole de mec…

Ensuite nous allons sur les lieux du crime où Jérémy me montre les traces : j’ai du traîner la bête sur 10 mètres, je n’ai pas freiné. Il ramasse ma calandre, qu’il venait de me refixer alors que je lui demandais depuis 6 mois, puis ma plaque; Il jette le reste des petits morceaux dans le fossé. À cet endroit il y a d’un côté un champ de maïs, et de l’autre côté de la route, le ruisseau. C’est un passage classique de sangliers, ils vont boire.

Jérémy m’a dit tout de suite que c’est un “solitaire” c’est à dire un mâle énorme. Les autres se déplacent en meute et dans ce cas les dégâts peuvent être pire, un droite, l’autre à gauche, un au milieu. Une “émeute” comme dit Marine qui ‘na pas compris le mot.

Plus tard Jérémy me dit que la bête pesait 73 kilos, comme son père n’avait pas le temps de s’en occuper car ils recevaient du monde, ils en ont fait don à une société de chasse. Laquelle l’a gentiment préparé et offert à l’agriculteur qui en avait assez des dégâts causés par ces squatteurs; Au final tout le monde a eu un cadeau, sauf moi.

Je ne suis pas sortie le lendemain. J’étais démoralisée. Plus de voiture, je devais rentrer avec une voiture de location, mais je devais aussi venir chercher Martine le week-end suivant et fermer la Sauvageonne.

Pourquoi moi ? Disais-je à ma mère ! Mes sœurs, mon frère, pour n’importe qui ce ne serait pas un drame ! Ils ont des voitures neuves, que l’assurance leur réparerait et au pire ils ont des sous pour en racheter !

Pourquoi moi qui n’ai pas d’argent pour en racheter une !

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