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J’ai déjà raconté la relation étonnante que Martine a avec la nourriture… Si je ne l’ai pas fait, dites le, je vous fais un préambule de 600 lignes !

Pour faire court, Martine ne nourrit pas sa tribu, elle la gave, son pire cauchemar est d’avoir une tablée à nourrir et rien à leur donner. À peine le dessert terminé elle parle du prochain repas, et sa phrase favorite est “tu en veux encore ?”

Elle n’a rien d’une boulimique (syndrome solitaire), elle se nourrit et veut nourrir tout le monde ! 

J’aime manger, j’aime les bons restos, mais le phénomène Martine est quand même une exception !

Nous voilà donc parties ce samedi matin pour Honfleur. Je vais prendre Martine à 9 h chez elle, elle me dit au téléphone :
- je ne te propose pas de café, sinon on va aller aux toilettes à peine parties, on s’arrêtera en route !

Quand elle monte dans la voiture, Martine me dit : j’ai préparé un petit en-cas ! Je me doute qu’elle ne nous laissera pas mourir de faim, ni de soif d’ailleurs ! Je suppose qu’elle veut pique niquer, plutôt que d’aller au resto comme prévu.
Soit, pas de problèmes pour moi !

Nous roulons, puis Martine me dit qu’elle n’a pas pris de petit déjeuner et me demande si je veux prendre un café.
OK, ça marche ! Nous nous arrêtons dans une station, il est 11 h. Martine prend un chocolat, je prends un café, et j’ajoute un croissant sur mon plateau. Martine me dit : c’est tout ? Elle ajoute un chausson aux pommes sur mon plateau. Soit, je sais qu’elle veut payer et que ça lui fait plaisir ! J’avais pourtant déjeuné normalement le matin !

Tandis que nous nous goinfrons grignotons, je demande à Martine ce qu’elle veut faire ce midi, je la connais elle ne va pas attendre 13 h 30 pour avoir faim, et il est déjà 11h, rien que de penser au repas, je n’ai pas faim ! 

- Tu veux pique niquer ?

- Non, on ira dans un petit resto !

Dans ce cas je me demande à quoi va servir l’en-cas, vu que nous nous sommes pas parties pour faire 700 km, mais bon, je profite quand même des bouteilles d’eau en conduisant ! 

Martine me parle comme d’habitude de ses souvenirs, de mon père… Je soupire intérieurement, elle ne fera jamais le deuil, et plus les années passent, plus je me demande si elle n’inventent pas des souvenirs, si mon père a vraiment dit et fait tout ça…
Parce que pratiquement tout ce qu’il a dit et fait, je l’ai vécu, et en plus, entendu dire par Martine au moins cent fois !

Nous arrivons à Honfleur, c’est jour de marché. Très vite, je regrette de ne m’être pas garée tout de suite ! 

- Zut ! J’aurais du me garer à l’entrée !

- Pas grave, il n’est que midi, on a le temps de manger !

MANGER ! Encore !

- Je ne suis pas venue pour manger ! Mais pour visiter !

Puis je me gare et nous visitons. Tout en marchant, Martine me montre dans quel restaurant elle allait avec Eugène, celui là, là bas, ah non l’autre ! 

Je prends des photos en écoutant d’une oreille distraite.

Je l’entraîne vers l’église. Heureusement Martine apprécie ce qu’elle voit. Puis bien vite, je constate que Martine ne pourra pas marcher longtemps. Je ferai bien un petit itinéraire, mais elle ne pourra pas suivre. Pas grave, je suis patiente, je peux adapter mon pas, et je suis venue pour elle, pas pour la bousculer. Nous nous mettons donc en quête d’un resto. Martine a envie de moules frites.

Je trouve le resto idéal, moules frites et crêpe en dessert. En général j’évite de manger trop quand je conduis, car j’aurais envie de dormir après, mais bon, je fais avec.

C’est délicieux, et nous repartons repues. Ensuite, je veux aller voir le Pont de Normandie. Il est un peu noyé dans le brouillard, c’est amusant ! On a l’impression qu’il se précipite dans le vide et disparait, il en manque un morceau ! 

Ensuite le Pont de Tancarville, puis nous repartons sur Rouen. Martine s’endort, j’en ferais bien autant, j’ai l’impression d’être une oie gavée !

Nous arrivons à Rouen ou je tourne encore en rond pour trouver une place. Pendant ce temps Martine me dit : “Tu veux un œuf dur, une compote à boire, un mini croque monsieur, des chips, un yaourt ?”

Car même quand je conduis, Martine me propose à manger ! Je lui réponds non merci, je conduis là, et ça me stresse de chercher une place ! Et puis je n’ai pas faim, on sort de table !

- Il est quand même 4 h !” me dit Martine, alors que ça fait quelques années que je ne prends plus de “quatre heures” et qu’importe l’heure, j’ai quand même l’impression de sortir de table, et le fait d’être assise, même si c’est en conduisant, me donne l’impression de ne rien avoir digéré !

Avant de repartir, Martine insiste pour que je mange quelque chose ! Son en-cas aurait été largement suffisant pour le déjeuner du midi, car elle a en plus 2 briquettes de jus d’orange et deux cocas ! 

Tu as tort de ne pas manger, il ne faut pas sauter de repas ! Euh tu sais moi depuis que je suis toute seule, il m’arrive d’oublier de manger quand je vais danser ! Et vu que j’ai beaucoup maigri, je ne vais pas m’en plaindre ! Et puis là, non vraiment je ne meurs pas de faim !

Je finis par accepter une compote à boire et un coca… Je n’en peux plus ! 

Quand nous arrivons, Martine partage son pique nique moitié moitié chacune : comme ça tu n’aurais pas à faire à manger ce soir !

Faire à manger ! Je crois que je vais m’écrouler devant la télé, je suis gavée, repue, je vais exploser, je n’ai qu’une envie, dormir… et digérer si c’est possible !

Ce que j’ai fait naturellement !

Je me demande comment fait Martine ! Elle a passé les 70 ans, elle a une santé de fer, même si elle se fatigue plus vite qu’avant en marchant. Mais ceux qui disent que les “vieux” mangent moins n’ont jamais invité Martine !