Dans la maison familiale, Cédric et Camomille ont toujours amené beaucoup de copains et copines. J’étais beaucoup plus calme, et Servane quand elle devint ado aussi.

Parfois j’avais du mal à supporter l’envahissement, nous n’avions pas chacun notre chambre… Mais finalement une famille nombreuse est une bonne école, il n’y a pas plus ouverte que ma maison aux copains, copines de mes filles !

Parfois il y en avait dans le lot qui étaient sympathiques, intéressants, et avoir à domicile un vivier pour faire son choix, pourquoi pas ?

J’avais 20 ans. Cédric 15 ans, avait toujours deux, trois copains avec lui, depuis le collège.

Parmi ses copains, il y avait Bruno. Il portait bien son prénom, brun ténébreux, d’origine espagnol. Il était plus petit que moi, ce qui n’est pas grand, plus petit que la plupart de ses copains. C’était un garçon extraverti, drôle, toujours le mot pour rire, le clown de service. Mon frère me disait qu’il était souvent puni, et qu’il y avait beaucoup moins d’ambiance dans la classe quand il était absent.

Peu timide, il pouvait aussi bien plaisanter avec ma mère, qu’avec ma grand mère.

Il me plaisait bien, et la réciproque était vraie. Ce qui devait arriver, arriva, nous avons commencé à nous embrasser dans les coins.

J’avais ma fierté, quand même, c’était un bébé, et je ne voulais pas que ça se sache !
Lui il s’en moquait éperdument !

Je ne me souviens plus bien comment nous faisions pour nous voir. Mais je me souviens assez de certaines conversations pour savoir que nous ne sommes pas contenté de baisers volés.

Cédric avait toujours des petites copines qu’il était occupé à papouiller. Alors Bruno disait qu’il venait me voir pour parler photo (il s’intéressait à la photo et à mon matériel) ou pour que je lui fasse écouter un disque, j’étais la seule à avoir une chaine stéréo, et je ne la prêtais pas.

Je me souviens d’un jour où plusieurs copains de mon frère et de ma soeur étaient là, et je m’étais réfugiée dans la chambre de mes parents pour lire. Je m’y croyais tranquille, point du tout ! Bruno, prétextant qu’il allait aux toilettes, ouvrit la porte et se jeta sur moi :

- Embrasse moi !

- Mais tu es fou, pas ici !

Je dus tout de même m’exécuter sinon il ne serait pas parti !

Je continuais à me comporter comme avant : parfois je me contentais de dire bonjour, c’était les copains de mon frère, pas les miens, parfois je restais avec eux à discuter. Mais j’étais verte de jalousie, quand en plus des copains il y avait des copines, et que je me demandais laquelle pourrait bien lui plaire ! Visiblement il s’en moquait, il se contentait d’être le clown de service, sans forcément chercher à plaire !

Vint le jour où nous devions fêter l’anniversaire de mon frère à la maison de campagne.

Nous arrivons la veille, plusieurs copains et copines dorment sur place, les garçons dans la tente plantée dans le jardin.

Je comptais me coucher tôt, en prévision de la fête le lendemain. J’étais en chemise de nuit, je me souviens très bien à quoi elle ressemblait. Longue, couleur safran, un grand décolleté soulignant le creux des seins, avec un énorme nœud fait plusieurs ficelles de tissu safran.
Il y avait même le déshabillé assorti.

Les garçons n’avaient pas envie de dormir, du coup ils débarquent tous, avec ma sœur, tout le monde s’assoit sur mon lit, et on discute.
Quand les garçons sont partis se coucher, Camomille m’a fait remarquer que Bruno avait passé la soirée à loucher dans mon décolleté, et que je pourrais “faire attention”. Je ne pouvais pas lui dire que mon décolleté, il avait déjà mis la main dedans (et peut être deux mains !)

L’année scolaire s’est terminée, Bruno a déménagé, je ne l’ai jamais revu. Cédric a fini par comprendre que ses copains ne s’intéressaient pas qu’à sa moyenne sœur, mais que tiens, la grande aussi ! Je n’ai pas cherché à nier. Plus tard, alors que j’étais beaucoup plus vieille, un an de plus, j’ai eu une histoire avec un autre copain de Cédric. Il était l’opposé de Bruno, grand blond et frisé ! Là nous ne sommes pas du tout cachés. Il assumait, moi aussi !

J’avais bien entendu totalement oublié Bruno. Un jour j’y ai repensé à cause d’un jeune homme qui lui ressemblait. Et toute l’histoire m’est revenue ! La mémoire est étrange.