Depuis toutes petites, mes filles ont eu à respecter des règles de prudence dans la rue et ailleurs.

Quand elles ont commencé à rentrer toutes seules de l’école, je les avais prévenues : si on les embêtait dans la rue, aller voir des gens qui ont des enfants, ou rentrer dans un magasin.

Puis l’arrivée dans notre rue pavillonaire :

- Si vous voyez que quelqu’un vous suit, ou vous embête, ne rentrez pas à la maison, pas question qu’un pervers voit où vous habitez ! Ou vous sonnez chez la voisine, ou vous faites le tour par derrière, dans l’impasse et vous allez voir un voisin. 

En effet, côté impasse piétonne, la deuxième entrée de la maison que nous utilisons rarement, nous connaissons tout le monde (plus que côté rue) et il y a toujours du monde. Un voisin qui travaille de nuit, dort le matin et est là les après midi, appelons le Arnold, ma petite voisine, la charmante Marguerite dont j’ai parlé, une autre voisine qui rentre chez elle le midi pour manger, et plusieurs retraités. 

Donc les maisons ne sont jamais vides, les volets rarement fermés. Et comme l’impasse piétonne est un territoire “relativement protégé” en tout cas seulement fréquentée par les habitants et le facteur, les portillons sur les jardins sont très souvent ouverts en grand. 

Sauf que voilà les enfants grandissent et les conseils de maman, une fois qu’on est une belle jeune fille, Pfft, on les oublie !

Athéna a 17 ans. C’est vendredi elle rentre de cours. Un type la suit et l’aborde. Il n’a pas l’air très net.

Athéna a une peur bleue des simples d’esprit (que je vais appeler Gogol pour simplifier).
Elle ne fait pas la différence entre un pauvre type qui parle tout seul ou chante dans la rue et qui fait plus pitié que peur, et un potientellement dangereux.

Souvent sa sœur et moi, nous la rassurons : mais c’est bon, il n’a pas l’air méchant, détends toi !

Non pour elle dès qu’un type bave, et a le regard pas net, c’est pire que croiser une araignée !

Et justement là il bave le type, et avec son cheveu sur la langue, il lui dit qu’elle est “bonne” que ça se voit qu’elle porte des bas, et autre gentillesses !

Athéna qui a oublié d’écouter sa mère, se dit qu’elle est presque arrivée. Quand elle veut rentrer dans la maison, il veut l’empêcher de passer. Elle réussit à ruser, contourne ma voiture, fonce, et réussit à fermer le portail à clé. 

Mais voilà il aurait fallu écouter maman et ne jamais montrer où on habite ! Le type sonne au portail dix fois, vingt fois, il ne part pas. 

Athéna affolée m’appelle au bureau. Je lui dis d’essayer d’appeler Arnold, mais elle a peur de sortir. Pourtant le gogol ne peut pas voir la porte de la maison, et elle pourrait sortir par le portillon de l’impasse sans qu’il la voit. 

Elle me dit que le portail fait du bruit, elle a peur qu’il l’escalade, ce qui est facile. Soudain elle crie :

- Maman il est rentré !

Je hurle (et je suis au bureau)

- Quoi ? Quoi ? Oh non ! Merde !

Finalement c’était une fausse alerte. Mais j’ai le coeur à 200 à l’heure. J’essaye d’appeler mon voisin sans succès. 

Je quitte le bureau en plein après midi pour rejoindre ma fille, même si je sais que ça ne servira pas à grand chose. 

Quand je rentre tout est calme, le type est parti, Athéna est rassurée. Je lui dis : “mais bon sang je t’ai toujours dit de ne pas montrer où tu habitais ! Il fallait passer par l’impasse !”

Mais bon nous n’y pensons plus, du moins nous croyons que c’est fini.

Mais c’est là que les ennuis commencent