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Ce que je vais expliquer là est difficile à expliquer, mais j’aime bien la complication.

Il y a une chanson de Jean-Jacques Goldman, Des vies, où on entend cette phrase “la sœur d’un voisin, on s’aime on se noce”.

Dans cette phrase, on essaie de démontrer que le jeune homme, d’un milieu aisé,  n’est pas allé chercher très loin son épouse…

Dans la vie il y a des aventuriers et les autres…

Certains vous disent qu’ils ont rencontré leur âme sœur au cours d’un safari en Afrique, ou que c’était une rencontre improbable, une personne perdue sur un quai de gare, quelqu’un qu’on aurait jamais du rencontrer.

Et puis il y a les autres. Ceux qui ont besoin de rester dans un milieu connu, ceux qui n’aiment pas le risque !

Jeune, j’étais persuadée de faire partie des ” aventurières ” et je me moquais des autres, ceux qui n’étaient pas allé chercher bien loin ! Mes parents s’étaient rencontrés au travail, c’est d’un nul ! C’est bon pour les coincés qui ne sortent jamais, qui n’ont pas d’amis, qui n’ont aucune imagination !

Je croyais, oui je croyais !

Mais ce n’est pas là où je veux en venir. Au delà de la sécurité, il y a l’ancrage dans le passé. Laurent avait besoin de cet ancrage dans le passé.

Comment ça se traduit ? Un lien, quelque chose de ténu, quelque chose qui nous relie à notre passé, à notre enfance. Laurent n’a jamais quitté son premier amour, son amour d’enfance, la petite fille dont il est amoureux à 5 ans. La petite fille ne l’a pas quitté non plus.
Laurent avait souvent la même réaction avec les amis, et même dans le travail, il s’est souvent entouré de gens qu’il connaissait depuis longtemps, ou qui avaient un lien avec d’autres.
Le lien peut être invisible, cette personne était le voisin de la grand-mère, ou a habité la même rue, ou l’ami d’un ami, la rencontre qui fait dire ” le monde est petit “. Un ancrage dans le passé.

Quand il s’est marié, je me suis moqué un peu ! Pas un aventurier, pas une grande imagination, pas de risques ! La sœur d’un voisin, on s’aime on se noce, dans son cas, c’était la petite sœur d’un ami de sa bande qu’il connaissait depuis 10 ans… La bande était d’ailleurs une sorte de famille, un cercle qui ne s’élargissait pas, on reste entre nous.

Puis j’ai fini par comprendre avec les années que moi aussi j’avais besoin de cet ancrage dans le passé. Après tout mon premier amour venait aussi de mon passé !

Depuis que j’ai perdu mon père, chaque fois que je croise quelqu’un qui l’a connu, quel qu’il soit, je sens combien je serais plus facilement indulgente envers quelqu’un qui revient ” de loin ” !

Maintenant je ne me moque plus, et je constate qu’il y a autour de moi beaucoup de personnes qui ont besoin de cet ” ancrage dans le passé ” si difficile à expliquer.

Un jour Tristan me racontait en riant un souvenir, un échange qu’il avait eu avec mon père, j’ai eu un déclic, j’ai réalisé qu’il n’y a pas de hasard.

J’avais besoin d’un ancrage dans le passé…