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Des petits com­plexes, tout le monde en a !
Tu ne trou­ves pas que j’ai le nez un peu gros ? Ça m’énerve d’avoir les genoux cagneux !
Ceux là on en parle sans sou­cis entre sœurs et copi­nes.

Mais il y a le gros, gros com­plexe, celui dont on ne parle à per­sonne. Celui qui fait trop mal pour qu’on le dise !

Beau­coup de fem­mes n’aiment pas leur corps. C’est bien dom­mage, car com­ment peut on don­ner et rece­voir en amour dans ce cas là ?

Je fai­sais expres­sion à la règle. J’ai tou­jours aimé le mien. Ça ne veut pas dire que je me trou­vais par­faite, loin s’en faut, j’avais cons­cience de mes petits défauts. Jeune, on est sou­vent nar­cis­si­que, j’y reviens plus loin, mais je ne me disais pas non plus : je devrais être man­ne­quin, je suis par­faite !

C’est juste que je m’aimais comme ça. Les fem­mes savent très bien quels vête­ments les met­tent en valeur, et quels autres mas­quent les petits défauts. Et puis comme je l’ai dit je bronze vite, et je m’aime vrai­ment bron­zée, j’aime­rais l’être toute l’année.

Jeune fille, j’ai eu des com­pli­ments sur mon corps. Sans doute est-il plus facile pour les jeu­nes ados de dire tu as un beau… et de beaux…
Si on com­mence à dire “tu as des yeux magni­fi­ques et si expres­sifs” on tou­che au domaine des sen­ti­ments ! Et mon­trer son âme est plus dif­fi­cile que mon­trer ses fes­ses !

Quand j’y repense d’ailleurs par­fois, je me demande si à la “période Nar­cisse” qui m’amuse sou­vent chez mes filles, je ne fai­sais pas l’amour “à moi même” ! N’étais je pas en train de me “regar­der” même sans miroir, dans dif­fé­ren­tes posi­tions ?

Mais reve­nons-en au com­plexe. Mon com­plexe chose incroya­ble, c’était ma tête. Mon visage. C’était un com­plexe sans en être un, c’est ça qui est bizarre ! On m’avait déjà dit, à com­men­cer par mes parents que j’avais des jolis yeux, des copi­nes me trou­vaient une jolie bou­che.

Si on m’avait dit “tu es vrai­ment très laide”, j’aurais sure­ment répli­qué : non il ne faut pas abu­ser quand même ! Je ne suis pas la plus belle, mais pas la plus laide non plus !

Et oui c’était bizarre : comme tou­tes les filles je me com­pa­rais, je savais que j’étais plus jolie qu’Alber­tine, mais que je n’aurais jamais la beauté tape à l’oeil de Lydie etc… Je pen­sais que je n’avais pas à me plain­dre, il y a de pau­vres filles à la place de qui je n’aime­rais pas être !

Si je plai­sais ? Bien j’avais tout un tas d’expli­ca­tion : c’était l’été, le bron­zage me va bien, je plais davan­tage aux hom­mes du Sud etc.

Mais ma tête c’était mon vrai pro­blème. Com­plexe dont je n’ai jamais parlé. J’ai pour­tant appris à sou­rire un jour, parce qu’un homme qui a compté dans ma vie, m’a dit que j’étais belle quand je riais et quand je sou­riais.

Mon ex mari ne m’a jamais ras­su­rée en s’exta­siant sur mes yeux ou mon sou­rire.

Et puis un jour j’ai eu comme un déclic. Je me suis dit ça ne col­lait pas mon his­toire. En admet­tant qu’un homme regarde une femme très bien faite de dos, qu’il la dépasse et qu’elle ait la tête de Qua­si­modo, je doute qu’il ait envie de l’abor­der. Que oui cer­tes, les regards pou­vaient être obli­ques, décol­leté par exem­ple, mais que j’avais tout de même bien sou­vent croisé des regards dans la rue, et que ce qu’on voit en pre­mier, c’est quand même bien le visage.

Ce déclic a été déclen­ché par qua­tre jeu­nes gens !

J’avais trente cinq ans. C’était le mois de juin. Je por­tais une robe à fleur que j’aimais et qui m’allait très bien. Je mar­chais sur une petite pas­se­relle, au des­sus de la rue en sor­tant du bureau. Qua­tre jeu­nes gar­çons sor­tent d’une golf noire qu’ils vien­nent de garer, en con­tre­bas donc par rap­port à moi. 25 ans à tout cas­ser, look un peu frime, lunet­tes noi­res. Les qua­tre me sui­vent des yeux, le chauf­feur enlève même ses lunet­tes pour me regar­der. Il sont si insis­tants que je me mets à sou­rire, en pen­sant à mon âge et au leur. Du coup ils me sou­rient aussi.

Peut-être étais-je prête à ce moment là à me défaire de mon com­plexe !

Mais d’où venait-il donc ?
À sui­vre !