Durant les années où nous étions encore célibataires, Didou vivait des choses qu'elle nous racontait. Elle voyageait beaucoup et souvent seule. Elle croisait beaucoup de gens avec qui elle gardait des contacts.

Un jour dans un aéroport, elle croisa un homme, appelons le Dorian. Il avait 12 ans de plus qu'elle (Didou a toujours aimé les hommes plus vieux). D'origine belge, c'était un aventurier, ex journaliste,  qui avait fait le tour du monde, il vivait au Pérou. Il avait écrit de nombreux livres, fait des conférences. Il était moyennement connu, du moins pour les lecteurs de Gé*o, et ceux qui s'intéressent à ce milieu.

Didou après cette rencontre, passa de nombreux mois à lire ses livres, à se documenter, à fantasmer. Elle alla même jusqu'à Bruxelles où il était né, pour voir l'immeuble où il séjournait rarement. Roselyne et moi étions assez surprises, d'autant que l'aventurier en question semblait avoir une vie s*exuelle, plutôt dissolue, faite d'aventures sans lendemains. Si Didou l'intéressait, tant mieux pour elle, mais nous avions un peu peur qu'elle ne soit déçue.

Car Didou a une particularité surprenante. Elle est très timide, bien que ça ne se voit pas au premier abord, plutôt mal dans sa peau, dirais-je. Elle parle très facilement et très vite, mais de nombreuses mimiques montrent qu'elle est mal à l'aise. Un silence et elle se dandine, elle multiplie les euh... euh.. fait des phrases alambiquées quand elle a quelque chose à demander, si bien qu'on ne sait pas ce qu'elle veut.
En terrain neutre, ça peut aller, invitée quelque part, même chez quelqu'un qu'elle connait depuis 20 ans, elle a des attitudes qui mettent mal à l'aise tout le monde, y compris ceux qui la reçoivent. Elle fait partie de ces gens qui donnent l'impression de s'excuser d'exister, ce qui est très agaçant.

Par contre contradictoire, comme nous tous, elle est capable des pires audaces. L'audace des grands timides.
Ainsi faire un voyage à Bruxelles pour voir quelqu'un qu'elle n'a croisé qu'une fois, Dorian et tant d'autres, dès le premier contact, elle pouvait débarquer chez un type, ou lui téléphoner, voir l'attendre à la sortie de son travail.

Quand je l'invitais à des "pots" pour le travail, j'avais toujours un peu peur qu'elle n'appelle ou n'envoie un mél à mon chef parce qu'il lui avait parlé gentiment. Un copain commun m'avait dit un jour qu'il se demandait bien ce qu'elle voulait, si c'était seulement de l'amitié, parce qu'elle avait "demandé à le voir" à son travail, juste parce qu'elle passait devant.

Dorian devait donc venir à Paris pour une conférence. Cela faisait plusieurs semaines que Didou nous en parlait, se préparait, allait chez le coiffeur. C'était une occasion unique, ils étaient restés en contact en s'écrivant (si Internet avait existé, cela aurait été plus facile) mais il y avait peu de chances pour qu'ils se croisent souvent.